Enquête parlementaire sur le foncier urbain : Plus de 100 milliards de F CFA pour l’Etat
C’est depuis le 14 juin 2016 que la commission d’enquête parlementaire sur le foncier urbain a été installe. Elle a rendu publiques ses conclusions ce jeudi 13 octobre 2016. Les conclusions révèlent des résultats accablants pour plusieurs dignitaires du régime déchu de Blaise Compaoré. L’enquête parlementaire a porté sur les lotissements effectués de 1995 à 2015 dans les grandes agglomérations urbaines du Burkina. L’étude a concerné notamment les deux communes de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.
Après 90 jours de travaux fouillés faits d’auditions, de recherches documentaires, de sorties de terrains dans quinze villes du Burkina, la commission d’enquête a diagnostiqué de nombreuses irrégularités dans toutes les communes couvertes par l’enquête.
Le rapport de la commission d’enquête parlementaire indique que « 269 acteurs intervenant dans le processus de lotissement dans les communes urbaines de Bobo-Dioulasso, Ouagadougou, Yako, Fada N’Gourma, Kaya, Manga, Kongoussi, Koudougou, Koupéla, Ouahigouya, Tenkodogo, dédougou, Ziniaré, Titao et dans la commune rurale de Pabré, ont été auditionnés ».
Les auditions ont permis à la mission de déceler des irrégularités et des difficultés au regard de la procédure prescrite par la réglementation en vigueur.
Dans les localités visitées, en 90 jours, les enquêteurs ont relevé plus de 105 000 parcelles entachées d’irrégularités. La commission a relevé, entre autres, des cas de lotissements de sites sans autorisation, des cas de morcellement d’espaces verts, des marchés et yaars, des terrains de sports et de réserves administratives sans autorisation, des occupations illégales, des changements de destinations sans autorisations, etc.
Sous Blaise Compaoré
Les cas sont légion d’une commune à l’autre mais les plus emblématiques concernent surtout des ex-dignitaires du régime de Blaise Compaoré.
Selon les enquêteurs, « le constat général qui se dégage est que de nombreuses opérations d’urbanisme ont été réalisées en violation de l’article 98 de la loi No 017-2006/AN portant code de l’urbanisme ».
Comme exemple, l’enquête de la commission parlementaire a mis à nu des pratiques dans la zone de Ouaga 2000. Les auteurs de ces pratiques ont été identifiés par la commission d’enquête parlementaire. Boukary Jacques Niampa, du nom de l’ancien responsable des infrastructures à la présidence du Faso sous Blaise Compaoré, est la tête de proue des distributeurs de parcelles à 40 000F/m2. Boukary Niampa, lui, disposait d’un package de parcelles à Ouaga 2000.
Dans la zone SONATUR, le rapport d’enquête souligne que « sur instruction verbale du Président Blaise Compaoré, 248 parcelles étaient administrées à Ouaga 2000 par Boukary Niampa ».
Les enquêteurs relèvent que Blaise Compaoré s’est octroyé 113 parcelles dans la commune de Ziniaré, son frère François Compaoré s’est adjugé 22 parcelles, 14 parcelles et une réserve ont été affectées illégalement à la Fondation Suka à Ziniaré.
Des cas précis
A Ouagadougou, la commission a relevé que la SOCOGIB, sous la houlette de Alizèta Gando et son Directeur général Eugène Zagré, a spolié populations de Yagma et Nioko II de plusieurs milliers de parcelles. Le rapport d’enquête parlementaire cite à plusieurs reprises les ex maires Pascal Ouédraogo, Constant Ouédraogo, Zacharia Sawadogo, Séraphine Ouédraogo, Salia Sanou dans la gestion frauduleuse des parcelles.
Selon le rapport, « 500 parcelles irrégulièrement attribuées par le maire de Bobo Salia Sanou, 10 000 m2 soit 33 parcelles environ accordés de manière opaque à la famille Barro Djanguinaba, 3 612 parcelles irrégulièrement attribués dans le cadre d’une extension du lotissement sans autorisation faite au secteur 29 de Bobo-Dioulasso. Toujours à Bobo, 535 parcelles sont allées au bénéfice de Zoromé Ousséni, directeur régional de l’urbanisme des Hauts bassins ».
La restitution du patrimoine spolié, l’Etat récupère plus de 105 000 parcelles
Dans cette opération, la commission d’enquête a permis à l’Etat de récupérer plus de 105 408 parcelles qui équivalent à plus de 100 milliards de FCFA au profit du trésor public.
Les parcelles retirées seront remises à une commission technique qui va procéder à leur réattribution suivant les textes en vigueur.
Les recommandations
Aux termes de l’enquête, les députés ont recommandé la reconstitution de tous les espaces verts par la démolition des occupations anarchiques et illégales. En plus, l’engagement des poursuites judiciaires à l’encontre des ex maires et des représentants des services techniques membres de la commission d’attribution ayant réalisé des opérations irrégulières d’aménagement. Aussi, le retrait des sites SOCOGIB de Yagma et de Nioko II pour occupation illégale.
Par ailleurs, l’expropriation du promoteur immobilier BTM de la carrière qu’il exploite à Yagma.
La commission a également recommandé la clarification des missions entre les ministères en charge de l’urbanisme, celui en charge des domaines et celui en charge de l’aménagement du territoire dans la gestion des lotissements.
Les enquêteurs parlementaires sur le foncier urbain à produit un rapport de plus 300 pages qui sera remis au Procureur Général le vendredi 14 octobre 2016.
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