Dépenses fiscales au Burkina : Les industries extractives se frottent les mains

Le Centre d’Etudes et de Recherche Appliquée en Finances Publiques (CERA-FP) dans le cadre d’un projet intitulé « initiative multipartite pour une économie humaine en Afrique (WAF) » a organisé un atelier d’échange ce jeudi 17 septembre 2020 à Ouagadougou. Au menu, la problématique des dépenses fiscales et des Flux Financiers Illicites (FFI) dans le secteur des industries extractives.

Dans le cadre de la mise en œuvre du code de transparence et de la réalisation des objectifs du programme de transition fiscale, l’UEMOA a poursuivi la construction d’un cadre fiscal communautaire harmonisé et favorable aux politiques économiques à travers la décision n°08/2015/CM/UEMOA du 02 juillet 2015 instituant les modalités d’évaluation des dépenses fiscales dans les Etats membres. Cette décision a pour objectif de permettre des évaluations régulières des mesures fiscales dérogatoires dans le but d’informer utilement les autorités et les citoyens de leurs impacts sur le budget de l’Etat.

En application de cette décision de l’UEMOA, le gouvernement burkinabè procède chaque année depuis 2015 à l’évaluation de ses dépenses fiscales. De ces évaluations, il ressort que les dépenses fiscales (exonérations fiscales et douanières et autres incitations) font la part belle aux entreprises (mines et cimenteries notamment) et aux ménages.

De l’avis du Président du Conseil d’administration (PCA) du Centre d’Etudes et de Recherche Appliquée en Finances Publiques (CERA-FP), Yoropo Abdoul Dembélé, le boum minier a attiré un nombre important d’entreprises multinationales comme investisseurs au Burkina Faso. « Or, ces types d’entreprises mettent en œuvre des moyens agressifs d’évasion fiscale qui devraient être considérés comme l’une des causes du problème plus général des flux financiers illicites » révèle-t-il.

Yoropo Abdoul Dembélé, PCA du CERA-FP 

Les Flux Financiers Illicites sont définis comme étant des capitaux acquis, transférés ou utilisés en contravention de la législation existante. « Dans certains cas, explique le PCA de CERA-FP, ces capitaux sont acquis illégalement, par exemple, la criminalité organisée, les activités de blanchiment, le trafic de drogues, les détournements de fonds, le financement du terrorisme et la corruption active ».

Dans d’autres cas, ajoute-t-il, ces sommes peuvent avoir été acquises légalement mais sont sorties du pays illégalement pour contrevenir au contrôle des changes ou aux contrôles douaniers.  

Les Flux Financiers illicites en Afrique supérieurs à l’aide publique au développement…

Les estimations les plus récentes de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) indiquent qu’au cours de la période 2000-2015, les flux financiers illicites nets entre l’Afrique et le reste du monde se sont élevés en moyenne à 73 milliards de dollars US par an (prix de 2016), rien qu’en raison de la fausse facturation.

« Ce qui est sensiblement plus que le montant moyen de l’aide publique au développement reçue chaque année par l’Afrique durant la même période », regrette Yoropo Abdoul Dembélé.

Pour freiner ce phénomène, au niveau de l’espace UEMOA, un cadre a été défini pour lutter contre les flux financiers illicites, en particulier le financement du terrorisme et le blanchiment des capitaux dans les Etats membres. A cela s’ajoutent des Cellules nationales de traitement des informations financières (CENTIF) mises en place dans chaque Etat membres, avec pour mission de recueillir, traiter et diffuser le renseignement auprès des autorités compétentes ou d’autres Cellules de renseignement financier.

Il convient de préciser cependant qu’au Burkina, il n’y a pas encore un système de statistiques qui permet de suivre de façon précise, ce flux financier illicite.

Des recommandations fortes sont attendues des échanges

C’est dans ce contexte qu’une plateforme des OSC conduite par le CERA-FP tient cette rencontre avec les acteurs concernés en vue d’échanger sur le cadre communautaire et son effectivité au Burkina Faso, avec en ligne de mire, nourrir le débat public pour l’amélioration de la pertinence des dépenses fiscales et la réduction des pertes de recettes induites par les incitations fiscales et les flux financiers illicites.  

Les recommandations issues de ces échanges devront permettre de voir quel dispositif peut être mis en place au Burkina pour suivre régulièrement et évaluer les Flux Financiers Illicites et les dépenses fiscales et interpeller le gouvernement sur l’ensemble de ces questions.

Maxime KABORE

Burkina 24

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