Paule Renée Etogo : « C’est à nous-mêmes Africains de travailler pour un positionnement positif de l’Afrique »
Discrète mais efficace, Paule Renée Etogo, la directrice des opérations du groupe de presse Samori Media Connection, éditeur du magazine Notre Afrik, et déléguée générale du Rebranding Africa Forum (RAF), dans cette interview accordée à Burkina24 peint les grands traits de l’édition de 2018. La 5e édition du forum économique se tient pour la première fois en Afrique les 5 et 6 octobre 2018 au Burkina Faso sur le thème : « Défis et opportunités de l’économie verte en Afrique ».
Burkina24 (B24) : Comment êtes-vous arrivée à la tête de la locomotive du RAF ?
Paule Renée Etogo (P.R.E) : Je suis depuis juillet 2016, la déléguée générale du RAF. C’est une position passionnante du moment où je me sens utile à l’Afrique. Je pense que ce qui est le plus important. C’est notre volonté de maintenir les choses positives pour l’Afrique et de changer ce qui devrait l’être. Avec mon équipe, nous travaillons dans une ambiance de complicité et de cordialité qui efface les hiérarchies professionnelles. C’est d’ailleurs efficace !
B24 : Le RAF se tient pour la première fois en Afrique. Pourquoi le choix du Burkina Faso ?
P.R.E : A travers le choix du Burkina Faso pour organiser cette 5ème édition, nous visons l’Afrique. Je voudrais mettre l’accent sur l’une des raisons de choix du « Pays des hommes intègres » qui est un modèle de réussite en matière de transition démocratique. C’est un pays qui suscite une admiration internationale. Par ailleurs, ce forum va contribuer aussi à donner un autre coup de pouce à l’économie burkinabè avec plus de 400 participants internationaux attendus.
B24 : Tenir le RAF à Bruxelles, c’était surtout pour rapprocher l’Afrique de l’Europe afin de mieux vendre la carte d’identité du continent. L’objectif sera-t-il atteint depuis le Burkina ? Où est-ce une volonté de vendre aussi une meilleure image de l’Afrique à l’Afrique elle-même ?
P.R. E : Oui, les objectifs du RAF seront atteints par cette organisation au Burkina Faso. Notre objectif reste de repositionner l’Afrique. Cette connexion avec l’Europe dont vous parlez n’est pas rompue. La diaspora africaine sera représentée à notre Forum ainsi que certaines institutions européennes qui sont nos partenaires. Ce partenariat pourrait avoir un effet de délier le cordon de la bourse au profit d’entrepreneurs et de pays africains comme les éditions précédentes.
B24 : Il n’est pas coutumier de voir des articles élogieux sur l’Afrique. Les Africains eux-mêmes ont tendance à peindre en noir leur propre continent. Quelle peut être la solution pour retourner cette situation ?
P.R.E : D’abord, si vous permettez, je voudrais souligner qu’il existe bel et bien des médias qui travaillent pour une image de marque de l’Afrique. Mais c’est vrai que l’Afrique est globalement mal perçue en Occident. C’est à nous-mêmes Africains de travailler pour un positionnement positif de l’Afrique. Et c’est ce que nous faisons à travers le Rebranding Africa Forum, qui souffle cette année sa 5ème bougie.
Je ne peux proposer ici une solution miracle. Je pense qu’il faut d’abord un travail de conscientisation et de prise d’espoir. Les Africains doivent croire en eux-mêmes et en leurs potentialités. Je vais vous raconter une anecdote. Il y a deux prisonniers qui regardaient dehors à travers les barres de fenêtre. L’un a levé les yeux pour admirer le ciel couvert d’étoiles et l’autre a baissé le regard à terre pour dédaigner la boue. A chacun d’opérer un regard positif : admirer le ciel étoilé de l’Afrique.
B24 : Selon vous, quel est le pays africain qui vend mieux l’image de l’Afrique ?
P.R.E : Comme vous le savez, l’Afrique est un continent qui regroupe 54 pays. C’est donc une diversité en même temps qu’une unité. Il serait prétentieux de ma part de vouloir procéder à une classification de pays selon le critère que vous me demandez. Et puis, chaque pays africain a son avantage comparatif. Tel pays valorise le continent en matière de gouvernance démocratique, tel pays en matière d’avancée technologique, de richesses de matières premières, de promotion musicale, cinématographique et j’en passe. Je peux dire que dans l’ensemble l’Afrique bouge et comme le disait Aimé Césaire, « L’heure de nous-mêmes a sonné ». Et tant mieux car de la stabilité de l’Afrique dépend en partie celle du monde entier.
B24 : Quelles sont les personnalités attendues ?
P.R.E : Oui beaucoup de personnalités sont attendues. Tout d’abord, cette 5ème édition est placée sous le haut patronage de son Excellence Roch Marc Christian Kaboré. La participation du président du Ghana et celle du président du Niger sont aussi confirmées. Pour les panélistes, c’est vraiment la crème intellectuelle de l’Afrique en matière d’économie verte qui va se retrouver. Il y aura en tout une quinzaine de panélistes dont je peux citer quelques-uns qui me viennent à l’esprit. Ce sont par exemple :
- Christian Adovelande, président de la BOAD
- Mme Metsi Makhetha, représentante Résidente des Nations Unies au Burkina Faso
- Mme Rosine Sori Coulibaly, ministre de l’Economie et des Finances, Burkina Faso
- Youssef Travaly, vice-Président Next Einstein Forum (NEF)
- Audrey Pulvar, présidente de la Fondation pour la Nature et l’Homme
Quant aux participants, ils ont des profils professionnels variés et nous viennent des cinq continents.
B24 : Le thème de cette année parle des « défis et opportunités de l’économie verte en Afrique ». Pensez-vous que le continent peut allier croissance et réduction des risques environnementaux ?
P.R.E : La prise en compte de la réduction des risques environnementaux dans le développement africain n’est pas seulement une possibilité mais une nécessité. Cette nécessité permettra d’avoir un développement équilibré et durable. Je pense que l’Afrique n’est pas la plus grande pollueuse dans le monde. Et si l’on remonte à l’Afrique traditionnelle, l’Homme a toujours vécu en symbiose avec la nature. Rappelez-vous que pour couper un arbre en Afrique, il fallait procéder à des libations et des demandes d’autorisation aux esprits supposés de l’arbre.
B24 : Le RAF a 5 ans. Son objectif est de vendre une meilleure image de l’Afrique. Après 5 éditions, quel est le bilan d’étape ? Sentez-vous une amélioration ?
P.R.E : Comme vous le dites, le RAF a cinq ans. Le bilan que nous pouvons tirer est positif. Nous sommes arrivés à instituer le RAF dans l’agenda africain. Il est cité parmi les rencontres à forte retombée pour l’Afrique et tant mieux.
B24 : Quel ratio faites-vous entre ce qui est fait et ce qui reste à faire ?
P.R.E : Malgré des progrès certains, nous ne devons pas dormir sur nos lauriers et baisser les bras. Nous devons travailler à préserver les acquis et à favoriser de nouvelles actions adaptées au contexte international changeant. Je suis sûre qu’il reste beaucoup à faire et c’est dans la synergie avec les Africains que nous relèverons le défi du développement.
B24 : Le RAF VI se tiendra-t-il en Afrique ?
P.R.E : Je pense que pour cette question, je pourrais vous répondre à la fin de cette édition du RAF. Le fondateur du RAF a l’exclusivité de l’annonce du pays qui devrait tenir la prochaine édition ainsi que de la date. Mais pour l’instant, nos énergies sont mobilisées pour la réussite de l’édition de Ouagadougou. Quel que soit le pays qui sera retenu pour la 6èmeédition, c’est l’Afrique qui gagne car le repositionnement de l’Afrique est l’âme du Rebranding Africa Forum.
Propos recueillis par Abdou ZOURE
Burkina24