Georges De Baziri, fondateur de GX226

GX226 : Pour une internationalisation du Faso dan-fani

George De Baziri est un styliste Burkinabè qui utilise comme matière première le Faso dan-fani. Pour lui le choix est simple : valorisation d’un produit national et contribution à l’émancipation de la femme. Après ses premiers pas dans la couture en Côte d’Ivoire, il a jugé utile de parfaire sa formation en France. Etablie à Ouagadougou et à Paris, la société GX226 entend surmonter les obstacles et internationaliser le pagne Faso dan-fani qui fait la fierté nationale.

Burkina24 (B24) : Qui est Georges De Baziri ?

George De Baziri(GB) : Je m’appelle George De Baziri, styliste Burkinabè à Paris et à Ouagadougou. J’ai appris ce métier de couturier avec mon père qui fut un tailleur. Et en 1976, j’ai rejoint mon oncle à Abidjan pour apprendre la couture. Donc c’est de 1976 à 1980 que j’ai subi ma formation.

J’ai par la suite ouvert mon atelier de couture à Koumassi et très vite, il y a eu du succès en raison de la qualité de mon travail. J’ai habillé des artistes à Abidjan et à Koumassi à l’époque. Et après je suis parti à Yopougon où les activités ont connu un boom spectaculaire. J’habillais des journalistes de la RTI entre autres.

En 1987, je suis parti à Paris pour me perfectionner et revenir en Afrique, plus précisément au Burkina Faso.

Pendant la crise ivoirienne j’ai ouvert mon atelier à Ouagadougou avec mon frère Xavier. Ensemble nous avons créé une griffe appelée GX226. GX226 signifie George et Xavier et le « 226 » représente l’indicatif téléphonique du Burkina qu’on a pris pour nous identifier en tant que Burkinabè.

B24 : En quoi consiste le métier de styliste ?

GB : En un mot, je peux dire que ce métier consiste à prendre un tissu et d’essayer de créer un modèle, d’inventer quelque chose qui n’existe pas. On crée un modèle et on le valorise.

B24 : Quelle appréciation faites-vous de la mode burkinabè à l’état actuel ?

BG : Je peux dire qu’au Burkina, la mode a un bon niveau. Quand je vois le travail des couturiers Burkinabè, je réalise que la mode a de l’avenir.

B24 : Pourquoi avez-vous choisi la valorisation du Faso Dan-fani ?

GB : Le Faso dan-fani parce que je suis un fan de feu Chris Seydou, le styliste malien qui a mondialisé le tissu bogolon. Donc je suis ses traces. Je me suis dit que s’il est arrivé à mondialiser le bogolon en créant des tenues européennes, pourquoi moi en tant que Burkinabè, je ne valoriserais le pagne Faso dan-fani en créant des modèles de type européen. C’est ce qui justifie mon choix du Faso dan-fani.

C’est aussi une façon d’apporter un plus à l’émancipation de la femme Burkinabè parce que ce sont elles qui portent l’industrie du Faso dan-fani.

Modele 1 Modèle2Modèle3

B24 : On remarque de plus en plus la valorisation du Faso dan-fani. Ce pagne a été à l’honneur par exemple le 8-Mars passé. Qu’en dites-vous ?

GB : Le Faso dan-fani est une étoffe chargé d’histoire en ce sens qu’il est utilisé depuis des siècles par les populations du Burkina Faso, les couturiers africains ont compris que dans le métier très concurrentiel qui est le leur, les étoffes locales pouvaient  leur permettre de faire la différence. D’où l’utilisation de plus en plus des textiles artisanaux dans les créations des couturiers africains : étoffe tissées en Afrique de l’ouest, raphia en Afrique centrale etc. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la valorisation du Faso dan-fani par les couturiers Burkinabé. Popularisé par Thomas Sankara pendant la période révolutionnaire, le Faso dan-fani est devenu aujourd’hui un référent culturel du Burkinabé où qu’il se trouve. Disons tout simplement que la visibilité actuelle de la haute couture Burkinabé est lié au Faso dan-fani.

C’est dans le mois d’août lors du Dan-fani fashion week organiser par Marguerite Douannio, que j’ai appris que le gouvernement de la transition à décider que le Faso dan-fani sera le pagne officiel du 8-Mars. A l’époque, je disais qu’il ne fallait  pas que cette décision dorme dans les tiroirs, ça n’a pas été le cas, et j’en félicite le gouvernement actuel qui  a décidé que c’est tout le Faso dan-fani qui est convié à la cérémonie de la journée internationale de la femme.

B24 : Quelles autres actions concrètes attendez-vous de l’Etat, pour une meilleure mise en valeur de ce pagne?

GB : Ce que j’attends de l’Etat est de recenser les associations des Tisseuses, des teinturières pour qu’elles aient une bonne formation. Elles nous fourniraient ainsi des pagnes de qualité, ce qui réduira le chômage. Et aussi, la formation des  jeunes dans le métier de la couture est importante. Je suis prêt à former les jeunes mais il faudrait que j’aie du matériel de couture. Si l’Etat pouvait donner un coup de pouce dans ce sens, je formerais les fils et filles de mon pays.

B24 : Quelles initiatives prévoyez-vous, de votre côté pour la promotion du Faso dan-fani ?

GB : Le 4 juin 2016 à Paris, il y aura la deuxième édition de la nuit du Faso dan-fani organisée par les créateurs Burkinabé de France dont je suis le Président et du 3 au 5 Novembre 2016 aura lieu un grand événement : une semaine culturelle à Kokologho organisée par l’Association pour la valorisation de l’art et du textile africain (Avata) et l’Association des tisseuses de Kokologho, C’est pour vous dire que c’est le pagne tissé qui sera à l’honneur de cette semaine culturelle.

B24 : Quelles difficultés rencontrez-vous dans vos activités ?

GB : Les difficultés ne manquent pas. En premier, nous n’arrivons pas à vendre nos produits. On produit mais on ne peut pas commercialiser à l’étranger. C’est vrai que je vis à l’étranger, mais si l’Etat pouvait nous aider à vendre nos produits à l’international, aux Etats-Unis, au Canada ou à Abidjan par exemple, cela nous ferait beaucoup plaisir.

Il y a aussi des difficultés liées à la disponibilité des pagnes. Par exemple, si je réalise un blazer en Faso dan-fani et que j’ai une commande de dix pièces, je ne pourrai pas les livrer en un mois parce que les femmes n’arrivent pas à tisser beaucoup. Donc il faut tourner dans les marchés pour chercher les pagnes. L’idéal serait qu’on forme ces femmes en groupement pour qu’elles puissent produire une quantité importante.

B24 : Avez-vous d’autres occupations que celle de styliste ?

GB : Oui ! En France je suis fonctionnaire à la mairie de Paris. Je ne vis pas que de la couture en France. Je commence le boulot à 6h et à 14h j’ai fini. Donc l’après-midi, je consacre mon temps à la couture qui est ma passion.

B24 : Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui se forment pour le métier de styliste ?

GB : Le conseil que je peux donner aux jeunes est de prendre patience. Aujourd’hui quand les gens me voient, ils disent que j’ai réussi. Mais ils ne se rendent pas comptent des difficultés que j’ai dû traverser. Quand on est patient et qu’on écoute son formateur, on arrive à s’en sortir.

Le métier de couturier est un métier noble. Alors je demande à ceux qui veulent l’embrasser de prendre patience. Il y a par exemple des jeunes qui viennent apprendre et une année après, ils veulent aller ouvrir leur atelier. Il faut faire au moins deux ou trois ans de formation. Ainsi à la fin on pourra faire du travail de qualité.

Entretien réalisé par Issouf NASSA

Burkina 24

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